06 juin 2009

Imbroglio politique en Mauritanie : Rien que de politique politicienne

Depuis le 06 Août 2008, la Mauritanie n’a cessé de subir les dégâts d’une politique insolite spécifique dans son histoire même si elle n’est pas sans précédent dans son genre. Plus que jamais, le renversement de Sidi O/ Cheikh Abdallah, président civil démocratiquement élu, dit-on, a fait émerger à la surface les vraies eaux troubles de notre société faites en réalité de dissensions internes fondées sur des considérations spécifiques jusqu’à là, réduites au silence par la peur du bâton, le devoir religieux et l’ignorance voire l’indifférence majoritaire du peuple. Affublés de part et d’autre par des slogans tendancieux traduits en défenseurs de la démocratie et en soutiens à la « rectification » du 06 Août, opposants et partisans du HCE par tout ce qui caractérise leur regroupement en général, par leurs conduites, ont étayé aux yeux de fins connaisseurs de notre pays les divisions que nous avons de plus en plus du mal à dissimuler. Avons-nous vraiment, de bel, échapper d’arriver aux mains après tant de dissensions ?
Le président déchu : Sidi O/ Cheikh Abdallah
Palais présidentiel à NouakchottEn tout cas c’est ce qui semble confirmer la tournure qu’ont prise les événements dans ces derniers temps. Militaire plutôt que politique, accro du pouvoir plutôt qu’autre chose, Aziz a su bien, à plusieurs niveaux, se montrer fin tacticien que ses opposants politiques. Par ses actions, il n’a pas manqué de réduire de jour en jour leur marge de manœuvre. Et ses deux armes de guerre sont d’ordre stratégique. Par son audacité du 06 Août dernier, il ne s’était fait montrer qu’un garant insoluble des intérêts des militaires qui auront sans doute une confiance aveugle en lui. D’où son pouvoir appuyé par son recours aux intellectuels pour assurer sa pérennité à la tête de l’Etat. Ainsi il n’avait pas manqué d’ailleurs d’entreprendre des actions qu’aucun de ses prédécesseurs n’a osées s’y hasarder. C’est le cas notamment, en pleine guerre de Gaza, de procéder à la rupture des relations diplomatiques avec l’Israël. Acte qui ne passera pas inaperçu aux yeux de nombreux mauritaniens et ceci au jour où Sidi devrait être à Nouakchott mais aussi à ceux de nombreux présidents à l’image de Kadhafi. Dans la continuité, il a procédé également, entre autres, au retour de nombreux négro-mauritaniens au rang des militaires hautement gradés. Et dernier en date mais pas le moindre, pour la première fois dans l’histoire de la Mauritanie, un noir est aux commandes de la courte période de transition qui doit déboucher sur les élections de simple formalité du 06 Juin prochain. Et le front national pour la défense de la démocratie (FNDD) dans tout cela ?
Loin de la réalité des champs politiques africains et arabes en général, le FNDD semble nager dans les idées. En effet, la démocratie dont il ne cesse de réclamer aujourd’hui, s’il doit prendre en compte l’histoire politique de la Mauritanie, n’a jamais été une réalité. Dans ce contexte faut-il leur rappeler simplement l’élection de Sidi, ce Sidi dont il réclame aujourd’hui, contre vents et marées, pour un retour à l’ordre constitutionnel ?
Autrefois pion direct des militaires, Sidi avait été utilisé, pour être l’expression même de ce qu’ils voulaient que la Mauritanie soit avec garantie de leurs intérêts indiscutables. Epée de Damoclès qui ne saura être respectée à la lettre par un homme pris en sandwich par un peuple avide de liberté, des politiciens apprentis ivres de contradiction injustifiée, et de la nature même de l’homme susceptible d’adopter un changement à 180° lorsqu’il a le pouvoir. Et tout le monde connaît l’issue : le bourbier politique où nous sommes aujourd’hui et qui s’annonce décidément sans fin à court terme si le FNDD et certains partis politiques resteront campés sur leurs positions intransigeantes de ne pouvoir digérer la candidature d’un militaire quelconque aux prochaines élections.
Général démissionnaire: O/ Abdel AzizCe qui est fait. Aziz a tordu le coup à la constitution à plusieurs niveaux. Se montrant plus realpolitik que ses opposants, il a démissionné formellement mais pas réellement. Le Pauvre Ba aujourd’hui à la tête de la présidence intérimaire n’est rien que l’objet d’un jeu de manipulation consistant à faire adhérer à ses idéaux des négro-mauritaniens qui n’ont pas manqué pendant des décennies de crier leur exclusion. Au moins ils sont temporairement considérés.
Quoiqu’il en soit, deux questions d’importance majeure se posent aujourd’hui : Quel est le vrai souci des politiques mauritaniens depuis tant des décennies surtout lorsqu’on prend compte de la politique prostituée que le pays n’a cessé de subir depuis le départ de O/ Taya ? Autrement dit quelle leçon de morale la jeunesse mauritanienne a apprise de leurs leaders politiques, pour ne pas dire leurs parents, depuis les indépendances ?
A ces deux questions, la réalité du terrain nous montre que le peuple a toujours été au second voire au troisième rang de soucis de nos politiques. Beaucoup de promesses, peu ou pas d’actions. La pauvreté et le désespoir continuent d’assommer le peuple. Les conditions de vie n’ont pas été aussi meilleures qu’il y a quelques décennies ou au moins pour ceux qui ont eu la chance d’avoir un parent occuper un poste clé. Ce qui est, quand même, contradictoire lorsqu’on prend compte le nombre important de luttes qui se font autour de la conquête du pouvoir. Pays arabe et africain, la Mauritanie est un mauvais exemple en matière de développement, malgré toutes ses richesses naturelles, comparée aux autres pays du Maghreb Arabe. Ses enfants n’ont rien appris de moralement bien à leurs leaders. Aujourd’hui, s’il y aura des études sociologues sérieuses, tout montrerait qu’un mauritanien sur trois aurait envie d’être militaire, gravirait des échelons puis se mettrait à la conquête du pouvoir. Mauvaise leçon. Car la question sera alors : A quand la fin de tant des coups d’Etats déplacés et insensés. A nos leaders de savoir alors que les temps ne sont plus à des futilités. Le peuple souffre trop. De ce fait, du travail plus qu’aux coups d’Etat. Nous écouteront-ils pour autant ? Attendons et voyons.