06 juin 2009

On ne récolte que ce qu’on a semé

Quoi de plus difficile si ce n’est tout simplement impossible que de se trouver une petite chambre à habiter à Sidi Moussa, un des quartiers populaires de salé lorsqu’on est africain et qu’on a la peau noire ! Quoi de plus complexé sur la route que d’oser se mettre devant un groupe d’enfants marocains lorsqu’on est africain de peau noire et surtout quand on est un peu moins bien habillé passionnément ! Quoi de plus extraordinaire que d’entrer subitement dans un café d’à-côté après une longue marche pour avaler un verre d’eau ! Quoi de plus onirique que de penser trouver facilement un stage non payant, pourtant, dans une entreprise marocaine quelconque lorsqu’on est africain de peau noire et de surcroît lorsqu’on n’ait pas un bras-long !
Dans la plupart de ces cas cités, l’oiseau à abattre est toujours cet hôte qui s’adonne à des comportements irresponsables. Le mot est lancé : il est impoli ; il est raciste. Souvent l’on se contente juste de s’étonner en ouvrant la bouche grandement puis clamant subitement « jamais je ne resterai dans ce pays ».
C’est vrai. On a raison. « L’africain » a raison de réagir ainsi. L’hôte n’a pas raison. Il n’a pas raison d’agir ainsi surtout vis-à-vis d’un autre africain, vis-à-vis d’un étranger en un mot de son frère. Il n’a pas raison de généraliser le cas d’un « africain » à tous les autres. Tous les africains ne sont pas quand même des mendiants. Tous ne sentent pas mauvais quand même. L’hôte doit, par contre, être aimable, hospitalier et juste. Il doit juger chaque « africain » par ce qu’il est, ce qu’il fait en ce moment même et là où il est d’ailleurs. Il doit aussi comprendre, même s’il n’est pas contraint, que lorsqu’on est à l’étranger, on est souvent contraint de faire ce qu’on ne peut jamais faire chez soi. Oui il doit le comprendre.
Mais en toute sincérité de ceux d’entre nous africains qui se plaignent de ces comportements à moi, il faut reconnaître que si ces défauts incombent à nos hôtes marocains, la responsabilité revient tout de même à nous qui nous nous en plaignons.
D’abord par mes propres expériences dans certain nombre de pays africains noirs, je peux me permettre de reconnaître en toute honnêteté que le comportement des enfants et de certaines grandes personnes marocains à nos égards n’a rien à envier de ceux de nos propres frères noirs à l’égard de leurs autres africains noirs. Ce qui est grave surtout lorsqu’on est de la même couleur. Mais tant pis. Ensuite que nos propres comportements ici au royaume ont dicté beaucoup de ceux de nos hôtes que nous repoussons aujourd’hui.
En effet trop souvent lorsqu’on fait quelque chose d’irresponsable, on semble le résumer et tourner la page d’une telle attitude déplacée avec ce moment bien précis. Erreur. Car si pour nous c’est passé, pour notre hôte qui parvient d’ailleurs mal à faire la différence entre les noirs africains s’il n’en connaît pas bien voire même très bien, ce comportement déplacé reste pour lui une expérience à faire revivre chaque fois qu’il se retrouve devant un noir.
Nous aimons les facilités. Peu d’entre nous aimeraient s’adonner à des travaux dignes. Alors, ne nous posons pas la question de pourquoi l’on fait de tous les africains mal habillés de mendiants. Ne nous posons pas la question de pourquoi l’on ne veut pas nous engager facilement dans des stages de perfectionnement lorsqu’on sait que certains d’entre nous sont tellement escrocs qu’ils prennent toujours la bonne personne pour conne. Ne nous demandons pas pourquoi l’on ne veut pas nous louer de chambre à Sidi Moussa, lorsque, chaque fois qu’on loge dans une maison notre esprit de société ne cesse d’indisposer les propriétaires de la dite maison par des visites fréquentes, des bruits de musique, des entrées et sorties de putes. Ne nous posons pas telles questions. Car en réalité ce que nous subissons n’est rien que ce qu’ont dicté nos propres comportements. Enfin de compte nous n’aurions récolté que ce que nous avions semé à défaut bien sûr de rien.