05 mars 2011

Commission Nationale de la Jeunesse : La jeunesse mauritanienne entre bravade des problèmes pressants et tabous inavouables d’envergure

Selon des informations fraichement reçues, vérifiées et avérées, le parti au pouvoir est en pleine manœuvre pour la mise en place d’un ensemble d’actions sensées servir de programme de référence à l’action du gouvernement en matière de jeunesse. Objectivement, pour tout celui qui connait notre pays, c’est là un des rendez-vous avec l’histoire à ne pas manquer. Mais seulement quelques préoccupations : les hommes qui seront chargés de concevoir telles recommandations, leur véritable mission, leur méthodologie de travail, le temps qui leur est dévolu et leur marge de manœuvre. Et à la lumière de l’ampleur, de l’acuité et en même temps de l’importance de la problématique, le parti au pouvoir, puisque c’est lui qu’il s’agit, a le devoir d’être objectif en termes de choix des hommes mais aussi celui de préciser clairement leur véritable mission.
En tant qu’un des jeunes avertis d’une jeunesse délaissée et négligée, surexploitée à outrance et victime d’une injustice quasi-institutionnalisée, minée par le chômage, dupée par les vendeurs politiques de rêve et laissée entre les mains du désespoir, donc du premier aventurier et de la première aventure, nous reconnaissons avoir des problèmes, beaucoup de problèmes, et pire encore des problèmes souvent voulus délibérément par nos autorités. Sincèrement, de ces problèmes-là nous en avons une idée claire comme nous savons aussi ce qu’en doivent être les véritables solutions. Toutefois, en espérant une suite productive à cette volonté politique inédite mais pas fortuite, il y a lieu de rappeler l’urgence des temps actuels qui implique le fait que la problématique de la jeunesse soit pensée à trois niveaux principaux : D’abord en termes des difficultés vécues par notre jeunesse, ensuite du point de vue problèmes de citoyenneté et de patriotisme et enfin en matière d’unité nationale.
Les problèmes qui désespèrent la jeunesse
Près de quatre mois après l’éclatement des crises dans les pays arabes, bien d’analystes se demandent pourquoi notre pays reste encore épargné. Pourtant même si les explications restent, entre autres, socioculturelles d’une population divisée du point de vue avis et engagement politique, rien ne nous garantit que la situation restera toujours la même malgré les immenses efforts consentis par notre président de la république. Une des raisons, les difficultés dont font face la jeunesse mauritanienne dont notamment le chômage, l’exclusion et le manque d’infrastructures de loisir sportives et culturelles et des conditions d’évolution sociale dignes des temps actuels.
A ceux-là s’ajoute le manque des libertés. Ironie du sort, nos dirigeants qui partent faire des escapades indignes d’un enfant de la rue dans des pays voisins interdisent à leurs peuples des sorties tardives by night. Et il n’est pas rare de voir des policiers arrêter des jeunes pour avoir simplement organisé des soirées dansantes. Quant aux descentes dans les boites et autres restaurants, on n’en parle pas. Etre un désœuvré est mauvais. Etre un désœuvré dans la monotonie peut nous amener à commettre le pire des crimes.
Il revient alors à nos autorités de trouver des solutions concrètes à ces différents problèmes. Par rapport au chômage des diplômés d’abord qui trouve, dans une certaine mesure, sa source dans notre système éducatif, ce dernier mérite d’être adapté de telle sorte que le formé puisse se créer du travail et rarement le contraire.
Ensuite, il s’agira de créer un environnement favorable à la création des PME en rendant disponibles les microcrédits et les formations y afférentes. L’Etat doit aussi retrouver toute son autorité en imposant aux entreprises implantées sur le territoire national le devoir indiscutable d’embaucher des mauritaniens comme dans tous les autres pays du monde.
Pour ce qui est du chômage des non diplômés, l’Etat se doit de favoriser des secteurs d’activité créateurs massifs d’emplois à l’image de l’agriculture, du tourisme et de l’artisanat, lesquels secteurs emploient déjà des dizaines de milliers de mauritaniens parmi les diplômés et les non diplômés et sur toute l’étendue du territoire national.
En matière d’infrastructures de loisirs, eu égard à l’ampleur des problèmes de la jeunesse, l’Etat se doit d’abord de mettre en place un ministère entièrement dévoué à la question de la jeunesse et des loisirs. Cette institution dirigée à 100 % par des jeunes, aura comme responsabilité principale d’œuvrer en vue d’une véritable insertion de la jeunesse mais aussi rendre disponibles les infrastructures nécessaires à son épanouissement. La jeunesse se doit d’être aussi libre. Car sans la liberté, l’esprit de créativité meurt et laisse la place au désespoir puis ce qu’on ne souhaite pas.
La jeunesse mauritanienne souffre également d’une injustice qui semble être institutionnalisée. Aux concours organisés par l’Etat les chances ne sont jamais égales. La règle implique sauvagement que 95 % des réussites soient des gens favorisés et seules 05 % d’autres catégories sociales. Et les premières victimes de cette injustice sont incontestablement les enfants des pauvres plusieurs fois plus nombreux que ceux des riches. Donc l’Etat est devenu une sorte de machine qui ne favorise que ceux qui ont déjà les moyens en ruinant davantage ceux qui n’en ont pas. Aujourd’hui encore cette exclusion a revêtu d’autres formes. Les déjà servis sont davantage servis. Tant pis pour ceux qui ne le sont pas. Et comment la jeunesse peut-elle espérer, d’un espoir qui peut la rendre fière de son pays dans de telles conditions ?
Quand la citoyenneté et le patriotisme faussent compagnie à la jeunesse…
Pendant mes longues expériences de l’étranger, j’ai eu à être témoin à plusieurs reprises de la ferveur patriotique de certains de nos voisins. Mais après moult analyses, il s’est avéré que le sens de patriotisme comme de la citoyenneté n’est jamais aussi gratuit comme on le pense. Si c’est d’abord une affaire d’éducation, elle est aussi celle de justice et de responsabilisation. Mais, il y a sérieusement lieu de reconnaître qu’en Mauritanie, la présence de l’Etat ne se ressent pas du tout et à plusieurs niveaux. Qu’il s’agit de trancher dans une affaire de justice ou encore de rendre disponibles les services de base à la population, l’Etat mauritanien semble être là pour veiller à la domination d’une partie de la population sur une autre. Aujourd’hui alors, comme entre autres effets, la jeunesse a du mal à se reconnaître. Sans aucun doute, elle ne saura non plus reconnaître sa responsabilité dans ce qui ne va pas dans son pays.
Il revient alors à nos autorités de faire revivre cette fougue patriotique par, en plus des réponses apportées aux problèmes rencontrés par la jeunesse, des actions citoyennes concrètes qui doivent passer par des encouragements et soutiens aux associations et coopératives de jeunes, aux artistes (musiciens, couturiers, teinturiers, sportifs), par la révélation et la valorisation des talents cachés dans tous les domaines à travers par exemple l’organisation des journées qui peuvent être intitulées « montrer-nous ce que tu sais faire » et la responsabilisation de la jeunesse dans ce qui ne va pas dans le pays.
Il leur revient aussi d’initier l’organisation, au moins une fois par mois, d’une journée citoyenne au service de la patrie. Cette journée qui peut revêt plusieurs formes peut par exemple être dénommée « si tu aimes ton pays, consacre lui cette journée ». Il s’agit aussi de véhiculer des spots publicitaires de sensibilisation sensés consolider les notions de citoyenneté et de patriotisme.
L’unité nationale, une nécessité mise à rude épreuve pourtant….
A y observer de près notre pays, force est de reconnaître que l’atmosphère en terme de relations intercommunautaires n’est pas ce qu’elle pouvait et devait être. Depuis fort longtemps, les différentes composantes de notre population se regardent en chiens de faïence. Et la situation est telle qu’aujourd’hui, des mesures urgentes soient prises afin de jeter les vraies bases d’un développement durable qui ne saurait être possible que sur un terrain sûr.
La jeunesse mauritanienne d’aujourd’hui, dirigeant de demain, peut être le véritable fer de lance d’une telle politique.
Mais à l’Etat mauritanien d’abord d’être juste, de reconnaître que la Mauritanie est ce qu’elle est. Elle n’est ni simplement arabo-berbère non plus négro-africaine mais plutôt la synthèse de ces deux entités. Et quoi que l’on fasse, cette réalité restera toujours ce qu’elle est. Jamais une des communautés ne peut effacer totalement l’autre physiquement. Donc que toutes les communautés de notre pays s’expriment comme il faut, qu’elles aient les mêmes droits et exécutent les mêmes devoirs dans tous les domaines et sur tous les plans de la vie quotidienne. Tel père, tel fils, la jeunesse ne saura que suivre l’exemple tracé par les ainés.
Ensuite les autorités doivent veiller à ce qu’une véritable communication intercommunautaire s’établisse par l’encouragement de la création des associations qui plaident en ce sens en leur apportant le soutien nécessaire possible. Aux rencontres et autres salons d’exposition également, la Mauritanie mérite d’être exposée dans sa diversité et non la simple représentation d’une communauté qui est certes mauritanienne mais jamais toute la Mauritanie.
A bien des points de vue, chacun de ces trois niveaux de la problématique jeunesse mérite une réflexion profonde sincère qui peut se décliner en deux phases principales : le diagnostic et les solutions qui s’imposent. Nous écoutera-t-on pour autant ?
En tout cas une chose est sûre : Ne laissons pas l’histoire nous contraindre à accepter de force ce qu’on peut faire à l’amiable. Et actuellement c’est ce dont la jeunesse mauritanienne a vraiment besoin.

Soulé A. Diarra
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